Le Conseil constitutionnel a rendu ce vendredi sa décision n°2/C/2025 relative à la loi organique n°09/2025 portant réforme du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale. S’il a validé la régularité de la procédure d’adoption du texte voté le 27 juin dernier par 138 députés, le Conseil a toutefois censuré plusieurs articles, estimant qu’ils portaient atteinte à la séparation des pouvoirs et à l’indépendance du pouvoir judiciaire.
Trois articles et une disposition clé déclarés inconstitutionnels
Parmi les points rejetés figure l’alinéa 2 de l’article 56, qui autorisait le président de l’Assemblée nationale à requérir la force publique pour contraindre une personne à comparaître devant une commission d’enquête parlementaire. Le Conseil a jugé cette disposition incompatible avec l’article 91 de la Constitution, en ce qu’elle permettrait de contraindre y compris des magistrats ou des citoyens non mis en cause, au mépris de leurs droits fondamentaux.
Le Conseil a également censuré l’alinéa 4 de l’article 57, qui permettait à une commission d’enquête parlementaire de saisir directement le Procureur de la République en cas de découverte d’une infraction. Cette faculté, selon les “sept sages”, empiète sur une prérogative relevant exclusivement du pouvoir exécutif.
De même, l’alinéa 6 de l’article 60, l’alinéa 6 de l’article 111 et l’article 134 de la nouvelle loi ont été jugés contraires à la Constitution. Ces articles, bien que techniques, ont été invalidés pour les mêmes motifs : ils introduisent des mécanismes parlementaires jugés intrusifs dans le champ de compétence réservé à la justice ou à l’exécutif.
Une ouverture encadrée sur l’audition des magistrats
Concernant l’alinéa 5 de l’article 56, qui autorise les commissions d’enquête à entendre des magistrats en exercice, le Conseil a opté pour une validation partielle, en posant des conditions strictes.
L’audition d’un magistrat ne peut se faire que : sur une base strictement volontaire ; pour des faits liés uniquement à l’organisation du service public de la justice ; à l’exclusion de toute affaire judiciaire en cours ou passée et après saisine préalable du Ministre de la Justice.
Un rappel des principes constitutionnels
Dans sa décision, le Conseil constitutionnel a tenu à rappeler que l’indépendance du pouvoir judiciaire, garantie par l’article 88 de la Constitution, est une composante essentielle de l’État de droit. Elle interdit toute immixtion, même indirecte, des pouvoirs exécutif ou législatif dans l’exercice de la fonction juridictionnelle.
Des dispositions validées malgré tout
Le Conseil a néanmoins validé plusieurs aspects importants de la réforme, notamment ceux relatifs à la clarification des procédures de levée d’immunité parlementaire, de remplacement du président de l’Assemblée nationale ou du retour des ministres devenus députés. Ces éléments, jugés conformes à la Constitution, permettent à l’Assemblée d’adapter son fonctionnement aux exigences contemporaines du travail parlementaire.
Vers une révision du texte conforme à la Constitution
Ce recadrage partiel constitue un signal fort de la haute juridiction sur les limites de l’action parlementaire dans un système fondé sur la séparation des pouvoirs. L’Assemblée nationale, sous la présidence de Malick Ndiaye, devra désormais ajuster le texte pour tenir compte de ces exigences constitutionnelles, dans un esprit de responsabilité institutionnelle et de respect des équilibres républicains.










